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L’HÉRITAGE DU SOUFISME DANS LA CULTURE ARABE

La culture arabe doit beaucoup au soufisme, cette renonciation à la vie matérielle, cette quête de l’amour universel et Divin. C’est surtout autour de la musique et de la littérature que le soufisme fait preuve d’exceptionnel. La quête du « beau », de l’art est pour le soufisme une injonction Divine: « Dieu est beau et aime la beauté« .

La poétesse irakienne soufie, Rabia Al Adawiya

Une femme, mère du soufisme

Bien que le soufisme considère son existence depuis l’avènement de l’Islam, les premiers érudits soufis naissent en Irak au 8° siècle, d’abord à Bassorah puis à Baghdad alors capitale de l’Empire abbasside. Rabia Al Adawiya considérée comme la mère du soufisme, est précisément née à Bassorah au 8° siècle. Quatrième fille d’une famille très pauvre, elle se retrouve orpheline encore enfant. Vendue comme servante, elle est libérée, rapporte la tradition, par son maître qui la découvre un jour absorbée dans la prière et auréolée de lumière. Rabia prend alors la décision de fuir la ville et ses divertissements pour se retirer dans le désert. Elle s’offre une vie pieuse et minimaliste et donne ses premiers enseignements à un petit groupe de disciples.

Rabia, pieuse et passionnée n’hésite pas à travers ses poèmes à dénoncer ceux qui essaient de réduire la Foi en une promesse de paradis ou d’enfer. Ainsi elle aurait écrit:

« Mon Dieu si je t’adore par crainte de Ton Enfer, brûle moi dans ses flammes ! Et si je t’adore par convoitise de Ton Paradis, prive m’en ! Je ne t’adore que pour Toi car tu mérites l’adoration. Alors ne me refuse pas la contemplation de Ton visage impérissable »

Contrairement à d’autres poètes soufis, Rabia réserve sa poésie à l’amour Divin. Servante, elle finit femme libre et condamne à son époque ce qu’elle considère être une société matérialiste et hypocrite, n’aimant Dieu que pour une promesse de paradis. Ibn Arabi, le poète, théologien et musicien andalou du 12°siècle rend hommage à Rabia dans Les Illuminations de la Mecque. Au 12°siècle justement, c’est cette époque que le soufisme s’organise autour de confréries et qu’une véritable culture soufie se construit.

Ibn Arabi

Ibn Arabi et l’amour universel

Si l’on doit citer un soufi pour l’importance de son oeuvre, c’est sûr il est question d’Ibn Arabi. Né en 1165 dans une famille d’aristocrates de l’Espagne arabe, Ibn Arabi bénéficie d’une formation classique en lettres arabes, théologie musulmane et musique. Il est contemporain du philosophe Ibn Rushd (Averroès) qu’il rencontrera lors d’une réception organisée par son père. Très tôt Ibn Arabi prend la route de la Mecque, il visite les villes importantes du Maghreb Fez, Tlemcen, Tunis et séjourne quelques temps au Moyen Orient avant de se rendre en pèlerinage à la Mecque.

En 1196, à Fez, Ibn Arabî reçoit une révélation de la part du prophète Mohamed, qui l’exhorte à chercher la vérité et atteindre à la sagesse. C’est le début pour Ibn Arabi d’un long cheminement intérieur que l’on pourrait maladroitement résumer à son poème « Religion de l’Amour »:

« Mon cœur est devenu capable d’accueillir toute forme. Il est pâturage pour gazelles et abbaye pour moines ! Il est un temple pour idoles et la Ka’ba pour qui en fait le tour, il est les tables de la Thora et aussi les feuillets du Coran! La religion que je professe est celle de l’Amour. Partout où ses montures se tournent, l’Amour est ma religion et ma foi. »

L’héritage d’Ibn Arabi est monumental, on lui prête l’écriture de plus de 800 ouvrages, ses poèmes sont toujours chantés aujourd’hui et ce largement grâce aux transmissions ancestrales des confréries soufies. Ces confréries au delà de l’aspect spirituel; sont de véritables institutions culturelles, elles forment aux lettres, à la musique et favorisent la transmission d’un héritage culturel et religieux. Ainsi malgré une transmission orale de la musique arabo-andalouse, celle-ci a pu résister aux assauts du temps et de la modernité.

Héritage soufi, l’heure de la modernité

Dans un monde où la consommation, la production et les extrémismes sont exaltés, le soufisme se réinvente mais ne négocie pas avec ce qui lui est essentiel: la quête du Beau et de la sagesse. De nouveaux d’artistes conscients du leg qui est fait, s’approprient ce patrimoine et l’adaptent aux goûts modernes. Yasmine Hamdan née en 1976, chanteuse et compositrice libanaise mêle la tradition musicale arabe avec des sonorités électro et des rythmes rock. Elle revendique les influences du soufisme dans ses interprétations, notamment du Ghazal, ce genre poétique d’origine perse qui chante les peines de l’amour.

Dans Souleyma, Yasmine interprète le plus beau poème (selon moi) de l’écrivain syrien Nawfal Bin Ghanem Elias. On doit la mélodie au compositeur libano-palestinien Cheikh Khaled Nasser Al Yafi héritier d’une longue tradition familiale de soufisme. Sur une mélodie qui crie l’agonie de l’amour, Yasmine Hamdan pose sa voix douce et ajoute du rythme funk à ce classique de la poésie arabe.

"Je me tiens à côté de ma tombe et puis ces mots:
Qui que je sois, Qui que je sois pour toi
Je t'ai trompé dans la vie, j'ai été futile
Je t'ai trahi amoureux et ne tu ne m'as pas trahi
[...]
Demain, quand je perdrai la vie, tu me suivras
Larmes scintillantes à l’œil, je le sais, tu me pardonneras. "

Le soufisme a également dépassé les frontières religieuses, ainsi Khalil Gibran, l’écrivain libanais et chrétien est parfois considéré comme un « soufi chrétien ». Si l’expression peut sembler exagérée, le soufisme étant par définition la mystique de l’Islam, on y voit l’influence du soufisme sur des artistes et penseurs arabes non musulmans.

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